Le pays le plus censuré au monde et la liberté d’expression

En 2024, la Corée du Nord occupe la dernière place du classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières. Les médias étrangers y sont interdits et la possession d’un téléphone portable connecté à l’international expose à des peines de prison. Même les conversations privées font l’objet d’une surveillance systématique. Toute information non validée par l’État est passible de lourdes sanctions, y compris la détention arbitraire. Ailleurs, les mécanismes de censure varient, mais n’atteignent pas ce degré d’étouffement de l’expression.

La liberté de la presse dans le monde : état des lieux et enjeux actuels

Le classement mondial de la liberté de la presse publié chaque année par Reporters sans frontières (RSF) révèle l’étendue des inégalités en matière d’accès à l’information. Les premiers du tableau, Norvège, Irlande, Danemark, bénéficient d’un environnement politique apaisé et de protections légales solides pour la presse. L’information s’échange sans barrières, portée par un climat de confiance et de transparence.

La France, en dépit de son histoire et de ses idéaux, doit faire face à une concentration galopante des médias et à une méfiance croissante du public envers les journalistes. L’Europe, aujourd’hui, demeure le territoire où la liberté de la presse est la plus défendue, mais les signaux d’alerte s’accumulent. L’attaque de l’Ukraine par la Russie a montré à quel point l’accès à une information fiable pouvait devenir fragile dès que la tension monte. Aux États-Unis, le débat public est plombé par une polarisation politique intense qui freine le travail d’enquête. En Amérique du Sud, l’Argentine doit composer avec des groupes médiatiques ultra-dominants et des rédactions précarisées.

Pour comprendre les menaces actuelles pesant sur le journalisme, plusieurs aspects méritent d’être soulignés :

  • Indépendance des médias bousculée : la multiplication des rachats, l’importance prise par les investisseurs et la dépendance aux revenus publicitaires réduisent la diversité de l’offre éditoriale.
  • EMFA (European Media Freedom Act) : ce texte européen vise plus de transparence et de sécurité pour les journalistes, mais son application nourrit de vives discussions, chaque pays cherchant à préserver une marge de souveraineté.
  • Déclaration universelle des droits de l’homme : l’article 19 rappelle le droit de s’exprimer et d’être informé, un principe souvent remis en question au gré des crises politiques ou économiques.

La liberté de la presse, loin d’être garantie une fois pour toutes, dépend d’équilibres fragiles. L’indépendance des rédactions, la lutte contre la désinformation, la pression de l’économie numérique : chaque avancée fait l’objet de tensions. Aujourd’hui, la vigilance de chacun face aux menaces contre l’information indépendante s’impose comme un impératif.

Quel est le pays le plus censuré et comment la censure s’y exerce-t-elle au quotidien ?

En haut du triste classement, la Corée du Nord verrouille enfermement de l’information avec méthode. Impossible d’y trouver la moindre divergence de point de vue : la presse, la télévision et la radio appartiennent toutes à l’appareil d’État. Les journalistes, devenus des employés du régime, ne font qu’amplifier la version officielle sans la moindre place pour la contradiction.

Dans ce contexte, accéder à internet relève de l’exception, réservé à une poignée de fidèles du régime connectés à « Kwangmyong », un réseau interne cadenassé. Aucune place pour les réseaux sociaux, aucun accès aux sites étrangers. Posséder le moindre document, image ou livre provenant de l’extérieur revient à risquer la prison, voire les travaux forcés.

Voici comment, très concrètement, la censure se manifeste au quotidien en Corée du Nord :

  • Surveillance constante : chaque foyer utilise une radio verrouillée sur la seule fréquence autorisée, rendant impossible toute écoute indépendante.
  • Filtrage total des contenus : qu’il s’agisse de photos, livres ou supports numériques venus de l’étranger, tout est interdit et puni de sanctions sévères.
  • Sanctions collectives : une infraction, même mineure, peut avoir des conséquences dramatiques pour l’ensemble d’une famille, et pas seulement pour le fautif.

Ce verrouillage extrême ne se limite pas à la Corée du Nord. L’Érythrée et le Turkménistan cultivent eux aussi une censure institutionnalisée, verrouillant la presse et traquant la moindre publication jugée subversive. Dans ces États, la liberté d’expression est un mythe, étouffée par la logique du pouvoir absolu.

Groupe diversifié utilisant ordinateurs et smartphones en ligne

Réfléchir à la liberté d’expression : pourquoi la censure concerne chacun de nous

La liberté d’expression ne se limite pas aux frontières de ces régimes fermés. Elle se joue aussi à travers nos usages quotidiens et la façon dont nous consommons, diffusons ou contestons l’information. La question de la modération des contenus, l’influence des grandes plateformes, la diffusion rapide de la désinformation : la censure prend parfois des formes plus subtiles, mais elle est bien présente, y compris au cœur des sociétés démocratiques.

Demeurer lucide est désormais indispensable. Chaque plateforme, chaque opérateur définit ses propres règles, parfois sans expliquer ni justifier ses choix. Sur Internet, jamais les opinions n’ont été aussi nombreuses, et jamais leur accès n’a été aussi fragile. D’un côté, la lutte contre la haine et la manipulation avance ; de l’autre, la tentation de restreindre le débat public gagne du terrain.

Quelques instants récents permettent de mieux saisir ce glissement :

  • De grands journaux ont dénoncé la difficulté d’informer lorsque certaines données sensibles étaient bloquées par les autorités.
  • Les plateformes décident, bien souvent sans consultation, de ce qui mérite d’être diffusé ou supprimé.

La liberté d’expression, consacrée par la Déclaration universelle des droits de l’homme, se débat dans un environnement en évolution constante. Même dans les démocraties, les frontières entre ouverture et restriction peuvent se déplacer rapidement, selon la conjoncture ou l’émotion du moment. Défendre cette liberté revient à refuser de banaliser la résignation et le silence collectif, où que l’on soit sur la carte du monde.

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