300 000 euros. Deux ans de prison. Aucun slogan publicitaire n’a jamais affiché de tels chiffres, mais c’est désormais la réalité qui plane sur chaque post sponsorisé non déclaré. En France, la règle est sans détour : toute collaboration commerciale doit être clairement signalée. Derrière un partenariat qui s’affiche sans cette mention, le couperet tombe vite. Pour ceux qui vivent de leur influence, impossible de se contenter d’un statut flou : auto-entrepreneur, société, salarié… il faut choisir, sous peine de voir son activité requalifiée en travail dissimulé. Les garde-fous ne se limitent pas à l’Hexagone. Dès que la promotion touche à des sujets sensibles, alcool, jeux d’argent, produits de santé, la transparence devient le mot d’ordre. Depuis 2023, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) multiplie les contrôles, et les conséquences d’un manquement ne se font pas attendre.
Le statut d’influenceur en Europe : une réalité juridique en pleine évolution
La réglementation des influenceurs ne cesse de se renforcer, portée par l’essor fulgurant des réseaux sociaux et la multiplication des publications sponsorisées. L’Union européenne ne reste pas en retrait : le Digital Services Act (DSA), entré en vigueur en 2024, rebat les cartes du secteur. Ce texte fait peser de nouvelles obligations sur les plateformes et, indirectement, sur tous ceux qui alimentent la sphère numérique.
Fini les zones d’ombre autour des partenariats commerciaux. Les créateurs de contenu doivent désormais pouvoir prouver leur statut juridique à tout moment. Le paysage réglementaire s’uniformise peu à peu, même si chaque pays conserve ses spécificités. La France, souvent en avance sur la loi influenceurs, inspire ses voisins européens. Le DSA impose notamment plus de transparence sur les collaborations, un suivi précis des publicités et une vigilance accrue contre les abus.
Voici les principales lignes de force de ce nouveau cadre :
- Le caractère commercial du contenu doit être annoncé sans ambiguïté
- La publicité est encadrée pour protéger les consommateurs des messages trompeurs ou agressifs
- La responsabilité des plateformes et des créateurs s’élargit, chacun devant répondre de ses pratiques
La régulation professionnelle se resserre. En France, l’ARPP travaille main dans la main avec d’autres autorités européennes pour surveiller et sanctionner les comportements déloyaux. Que l’influenceur agisse sous son nom ou à travers une société, il doit composer avec un environnement normatif mouvant, où la conformité ne se discute plus.
Quelles obligations et responsabilités pour les créateurs de contenu ?
Sur les réseaux sociaux, la publicité s’invite partout et relève désormais d’un encadrement strict. En France, la transparence est de rigueur : chaque partenariat rémunéré, chaque promotion de produits et services, doit être clairement identifié comme tel. Le non-respect de cette règle expose à des sanctions administratives. L’objectif est clair : préserver les consommateurs et limiter les pratiques commerciales déloyales.
Pour se conformer à la réglementation, les créateurs doivent respecter plusieurs points :
- Indiquer de façon explicite les contenus sponsorisés (via #sponsorisé, #publicité, etc.)
- Se conformer au code de la consommation et au code civil : loyauté, véracité et clarté des messages ne sont pas négociables
- Rendre compte de toute opération commerciale mettant en scène des mineurs
Une vigilance particulière s’impose également dès qu’il s’agit de promouvoir des produits ou services sous surveillance réglementaire : parfums, jeux d’argent, dispositifs médicaux… L’influenceur reste responsable de chaque contenu publié, même lorsqu’il relaie une opération montée par une marque ou une agence. En 2023, la France a resserré l’étau, permettant au régulateur d’imposer des amendes significatives.
Ce dispositif de contrôle ne s’arrête pas aux frontières nationales. Le Digital Services Act généralise, à l’échelle de l’Union européenne, des obligations similaires. Les plateformes sociales doivent collaborer avec les autorités pour détecter les dérives et garantir la traçabilité des contenus à caractère commercial. Qu’on exerce à Paris ou ailleurs, il devient impossible de faire l’impasse sur ce nouveau cadre, qui redéfinit durablement les règles de l’influence commerciale en ligne.
Comprendre les différents statuts juridiques possibles pour exercer en toute légalité
Le choix du statut juridique façonne le quotidien et l’avenir de chaque créateur. Face à l’administration, plusieurs voies s’ouvrent. L’auto-entreprise attire par sa simplicité : formalités réduites, gestion allégée, affiliation rapide à la Sécurité sociale des indépendants. Le revers : un seuil de chiffre d’affaires à ne pas dépasser, et une responsabilité illimitée sur ses biens personnels.
Dès que l’activité prend de l’ampleur, d’autres modèles prennent le relais. La SASU ou l’EURL permettent d’inscrire l’activité sous une structure plus robuste, avec une personnalité morale distincte et une limitation de la responsabilité. Contractualiser avec des marques ou des agences d’influence marketing devient plus simple, mais les démarches administratives et les cotisations sociales s’alourdissent. La contrepartie : une crédibilité renforcée et une protection du patrimoine personnel.
Voici un aperçu des principales options :
- Auto-entrepreneur : gestion simplifiée mais seuils de chiffre d’affaires limités
- SASU/EURL : structure plus complexe, dirigeant assimilé salarié ou gérant majoritaire, fiscalité ajustable
- EIRL : séparation des patrimoines professionnel et personnel, peu plébiscité aujourd’hui
Un autre point ne doit pas être négligé : la propriété intellectuelle. Gérer les droits sur les contenus produits, protéger ses marques, respecter le code de la propriété intellectuelle… autant d’enjeux qui comptent pour qui ambitionne de bâtir une activité durable, que l’on débute seul ou épaulé par une agence.
L’influence, hier terrain de jeu sans règles, s’impose désormais comme un secteur balisé, où chaque choix, du statut juridique à la gestion des contenus, pèse sur la crédibilité et la pérennité du créateur. Naviguer dans ce paysage demande rigueur, anticipation… et un œil attentif sur la moindre ligne de réglementation. Car dans cet univers, la frontière entre visibilité et responsabilité n’a jamais été aussi nette.